31 SOC folklore – rôle dans la vie sociale – 1990

Le rôle du folklore dans la vie sociale (synthèse BTS, 1990, correction d.g.d.g)

 

Il s’agissait de faire une synthèse à l’aide des documents suivants :

Doc 1 : Arnold Van Gennep, « Le Folklore » 1924, dans « Coutumes et croyances populaires en France » Ed. Le Chemin vert, Paris 1980

Doc 2 : Claude Roy, Introduction au « Trésor de la poésie populaire », Ed. Séghers, 1954.

Doc 3 : Pierre Jakez Hélias, « Le Cheval d’orgueil », Ed. Plon, 1975.

Doc 4 : Eugen Weber, « La fin des terroirs » , 1976, pour l’édition originale américaine.

Doc 5 : Gottlib, « Les Dingodossiers », Ed. Dargaud, 1967

 

Code : 0 = introduction(s) et 9 = conclusion(s)

  1. Introduction. Quatre textes datés de 1924 à 1976 et un dessin de 1967 font le point sur la question du folklore, sa nature et son rôle social. Ces cinq documents correspondent à trois visions bien différentes : vision informative, historique chez A. Van Genneb (doc 1) et E. Weber (doc 4) ; vision généreuse, engagée chez C. Roy (doc 2) et P.J Hélias (doc 3) ; enfin vision humoristique et critique chez Gotlieb (doc 5). Nous examinerons l’univers folklorique, ce qu’il recouvre avant d’aborder sa portée sociale et politique.

1.0 Examinons d’abord l’univers folklorique.

1.1 La notion est cernée par P.J Hélias qui en rappelle l’étymologie (folk : peuple et lore : science doc 3) ainsi que par Van Hennep qui y voit l’œuvre de spécialistes habiles en transposition (de la miniature au portail par exemple), créant anonymement sur des éléments collectifs (doc 1). Toujours pour Van Gennep, le folklore n’a ni auteur, ni époque. Il relève d’une catégorie spécifique (doc 1). Le dessins de Gotlieb semble partager cette vision collective et anonyme (doc 5).

1.2 Le folklore c’est d’abord pour Van Gennep le conte qui circule de bouche en bouche (doc 1), ce que confirme Gotlieb qui nous montre un vieil homme racontant une histoire de dragon (doc 5). Mais pour C. Roy c’est aussi la poésie populaire qui traduit la joie, le plaisir, l’évasion, l’apaisement, l’amour vécus par le peuple (doc 2).

1.3 Le folklore c’est aussi pour Gotlieb la danse, la chanson, la nourriture (doc 5). Van Gennep évoque de son côté la chanson certes mais aussi les meubles, la poterie et toutes les productions collectives (doc 1). P.J Hélias va dans le même sens avec les moyens matériels, les techniques et aussi la psychologie collective (doc 3) Enfin E. Weber s’attache plutôt aux coutumes : une part de la semence réservée à Dieu, une autre aux nuisibles, la dernière au sol ; pratique de la fiancée enlevée mais consentante… (doc 4).

1.4 Van Gennep observe que ces textes relèvent de catégories universelles (doc 1). Gotlieb le rejoint ironiquement dans une vision hybride faite de vache landaise, de chapeaux bretons et de chansons provençales (doc 5). Universalité très vite dégradée selon J.P Hélias dans l’adjectif « foklorique » au sens du farfelu, de la pagaïe, de la contre-vérité (doc 3). Le dessin de Gotlieb joue lui aussi sur le farfelu, les gags et la pagaïe.

1.9 Création populaire, anonyme, couvrant toute l’activité sociale, le folklore semble être desservi par cette richesse même.

 

2.0 Dès lors le folklore recouvre des éléments ambigus.

2.1 Van Gennep rappelle que cette production s’adressait à la masse de la nation (doc 1). P.J Hélias dit qu’il recouvre la totalité de la civilisation populaire (doc 3). Mais le dessin de Gotlieb semble se demander de quelle masse il s’agit, des paysans… ou des touristes ? (doc 5).

2.2 C. Roy parle du rêve dun « bon vieux temps », d’un âge d’or rutal (doc 2). Et P.J Hélias évoque la naïveté bon enfant , la nostalgie pastorale (doc 3). E. Weber pense que la disparition des paysans incite à cette sentimentalité (doc 4). Gotlieb note ironiquement la récupération économique du mythe : la grande fête est organisée au milieu des vacances, quand il y a le maximum de touristes (doc 5).

2.3 E. Weber et Gotlieb sont les seuls à insister sur la superficialité de ce folklore : l’un et l’autre évoquent les cartes postales, les costumes paysans, les fêtes et les danses (doc 4 et 5).

2.9 La folklore, art de masse, largement mythifié est quelquefois vécu dans sa seule superficialité.

 

3.0 Dès lors on peut s’interroger sur la portée sociale et politique du folkore.

3.1 D’abord il y a un malentendu historique. Les recueils de chansons rassemblés sur le Second Empire tendaient à prouver que le peuple acceptait son sort, note Van Gennep (doc 1). Weber remarque que c’est entre 1880 et 1895 que l’on constitue des musées d’arts et de traditions populaires tandis qu’en 1894 Jean Macé, fondateur de la Ligue de l’Enseignement, souhaitait la disparition du folklore (doc 4). La dimension sociale et politique est soulignée par C. Roy qui évoque les chansons contre le servage, l’armée, le clergé et les patrons (doc 2). Même tonalité chez J.P Hélias pour qui le Festival de Cornemuses traduit un souci politique sous jacent (doc 3). Ce que semble contester le dessin de Gotlieb : on ne lutte pas politiquement mais on récupère (doc 5).

3.2 Selon C. Roy, la poésie populaire serait un témoignage ni anachronique, ni rassurant (doc 1). Hélias affirme que la tradition permet de contester la nouvelle société (doc 2). Les personnages de Gotlieb sont bien loin de la contestation ou de la révolte : paysans et touristes rient et fraternisent (doc 5).

3.3 Hélias et Gotlieb semblent s’affronter directement. Pour le premier beaucoup font semblant mais connaissent le sens profond du folklore, protestation contre le colonialisme et l’humiliation qui vient des profondeurs de l’âme (doc 3). Gotlieb ne montre rien de ce sens profond, tout se réduit à une rigolade franche et très superficielle (doc 5).

3.4 C’est le phénomène de masse qui permet la récupération. Hélias remarque que les 4 000 acteurs des Fêtes de Cornouailles se produisent devant 100 000 spectateurs (doc 2). Le dessin de Gotlieb traduit à sa manière l’ampleur du phénomène : une douzaine d’activités pour une soixantaine de personnages.Hélias admet et regrette que la danse traditionnelle devienne le dessert du touriste (doc 3). Touriste consommateur, voyeur et photographe suggère Gotlieb ; pas moins de 17 appareils en fonction… et un magnétophone (doc 5).

3.9 Les arts populaires témoignaient d’une vie du passé qui avait ses joies, ses peines, se révoltes. Mais le folklore est devenu une activité de loisirs pour le tourisme de masse et une source de profits pour la paysannerie.

 

  1. Conclusion. L’intérêt du folkore est évident à travers ces textes car il montre la diversité et la richesse de la culture populaire. Redécouvert dans une démarche ambiguë et contradictoire, le folkore peut être vécu comme contestation ou comme récupération.

Mais voici qu’avec Disneyland nous arrive un autre univers qui peut lui aussi prétendre au moins en partie à la qualité de folklore : les dessins animés de Walt Disney ont souvent été empruntés aux vieilles légendes européennes (Blanche-Neige et les sept naims, la Belle au bois-dormant…) Beaucoup contestent la qualité de ce folklore. Serai-il si dangereux ?

Ce que l’on peut craindre c’est qu’il porte ombrage aux activités folkloriques habituelles, leur enlevant une partie de leur clientèle. Pourtant, en devinant l’univers aseptisé de ces parcs de loisirs, beaucoup continueront à préférer l’univers un peu désordre des fêtes populaires à la Gotlieb

Actualisation 2017. Il faudrait évoquer le Puy du Fou :

« Le Puy du Fou est un parc de loisirs à thématique historique situé en Vendée et fondé en 1978, par Philippe de Villiers. Il est actuellement présidé par l’un de ses fils, Nicolas de Villiers.

« Le parc héberge la Cinéscénie, un spectacle nocturne pris en charge par des bénévoles retraçant l’histoire de la Vendée à travers la présentation de scènes de la vie quotidienne d’une famille de paysans royalistes du Moyen Âge au xxe siècle et dans lequel est présentée une vision mythifiée d’un consensus social qui aurait caractérisé la Vendée historique.

« En ce qui concerne le parc en lui-même, il reprend des éléments historiques de l’histoire de la région environnant le Puy du Fou et les adapte pour en faire des spectacles, mettant notamment à profit des animaux dressés (chevaux, rapaces, fauves et bétail), et des effets spéciaux et pyrotechniques. Le parc est aussi un lieu de présentation des coutumes ancestrales avec un fort du Haut-Moyen Âge, un village du bas Moyen Âge, un village du xviiie et un Bourg du début du xxe, tous reconstitués, et où travaillent des artisans formés aux techniques artisanales de chaque époque. Le parc peut également s’appuyer sur une école de dressage de chevaux et sur une académie de fauconnerie participant à des programmes de réintroduction de rapaces dans leur milieu naturel.

« D’une manière générale, à travers les différents spectacles historiques qui sont présentés au Puy du Fou, ce sont surtout les chrétiens et les royalistes qui sont mis en scène, se battant contre leurs ennemis (Empire romainVikingsAnglais lors de la guerre de Cent ansRépublicains lors de la guerre de Vendée…). La guerre de Vendée est un thème particulièrement abordé par le parc qui met en avant de nombreuses figures du camp royaliste, avec notamment les Maupillier et le général de l’Armée catholique et royale de VendéeFrançois Athanase Charette de La Contrie.

« En 2014, il est le second parc à thème de France par sa fréquentation derrière le domaine Disneyland Paris et ses parcs Disneyland et Walt Disney Studios. Le Puy du Fou est également un des rares parcs à thème d’Europe à avoir été distingué par un Thea Classic Awards, décerné par la Themed Entertainment Association, en 2012. Il a depuis reçu plusieurs prix et distinctions lors de l’Applause Award et des Parksmania Awards pour la qualité des spectacles, des animations ou des effets spéciaux. » (Wikipédia)

 

Roger et Alii – Retorica – 1 660 mots – 9 900 caractères – 2017-07-12

 

 

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