BTS SUJET I CLASSES SOCIALES

J.CAZENEUVE : QUI VOUDRAIT SE DIRE BOURGEOIS ?

 

Aux élèves de BTS Il n’y a pas de sujet nul ou inintéressant. Par contre il y a des gens nuls et inintéressants… parce qu’ils ne veulent pas faire l’effort de s’intéresser, de percer le mystère du sujet posé.

Ce sujet frôle le lieu commun. Certains (les mêmes) y tombent et dissertent sur l’argent « qui ne fait pas le bonheur » etc.

Le sujet part des classes sociales pour aboutir à deux thèmes fondamentaux : la CULTURE et le BONHEUR. Il ne faut pas le traiter abstraitement. Trop d’élèves ne savent pas que « LA CARTE N’EST PAS LE TERRITOIRE » : abandonner l’abstrait (la carte) pour le concret (le territoire), la considération lointaine pour l’exemple proche et en cas de besoin, qu’il y a-t-il de plus proche de soi que soi-même ? Soigner l’exemple : EX-VAK : Visuel, Auditif, Tactile. Là est le territoire.

Par ailleurs une copie n’est pas appréciée en elle-même mais par rapport aux autres copies. Vous souffrez devant un tel sujet ? Vous n’êtes pas le seul. Accrochez-vous… comme les autres.

 

1. a) Résumé [15O mots demandés pour 52 lignes données, donc 3 mots par ligne. 4 paragraphes, le 2° très long peut être scindé en 3 parties aux deux articulations « Bref… », « En bref…). On obtient :
2. 4 lignes = 12 mots

2.1      12 lignes = 36 mots

2.2      8 lignes = 24 mots (Bref…)

2.3     9 lignes = 27 mots

3. 12 lignes = 36 mots
4. 6 lignes = 18 mots ]

 

1. (4 l, 12 m) La bourgeoisie se nie sous l’action des idées et des mœurs qui ouvrent les classes. [16 mots]

2.1 (12 l, 36 m) Les bourgeois évoluent, revendiquant des goûts nouveaux, changeant de classe et de mœurs,se refusant comme bourgeois fût-ce moralement. C’est évidemment un leurre mais le feindre leur suffit.[3O mots]

2.2 (8 l, 24 m) Partis à la conquête du bonheur, ils le cherchent là où ils ne le voulaient pas autrefois, ce qui leur a définitivement ôté toute tranquillité. [25 mots]

2.3 (9 l, 27 m) Pourtant ils existent encore mais, se reniant, ils renient un bonheur qui reposait sur des acquis solides. Ses débris deviennent inavouables ou laissés aux classes moins favorisées.[27m]

3. (12 l, 36 m) Devenus simplement des gens riches ils se réclament d’autres idéaux ou se fondent dans la masse. Ils peuvent alors soit partager des aspirations spiritualistes ou humanistes soit choisir un mode de vie jouisseur et médiatisé. [36 mots]
4. La masse, elle, ne se demande plus si elle est heureuse mais se satisfait de la consommation. [17 mots]               TOTAL : 153 mots

 

1. b) explications. – « un certain archétype de vie heureuse » Un archétype est un modèle de type supérieur. L’expression désigne l’idéal d’une vie heureuse. (étym : type,figure,image en relief + arché- : ancien)

– « intelligentsia ». Le mot, d’origine russe, désigne la classe des intellectuels. Il est un peu péjoratif.

– « le conformisme ». C’est une attitude d’esprit qui juge que le code de bonne conduite consiste à penser et agir comme la masse de ses contemporains sans faire preuve d’originalité ni prendre de risques (fa- mille de conforme et non de confort ! même s’il est confortable de pratiquer le conformisme !).

 

 

 

 

1. c) Discussion. Que pensez-vous de l’expression  » Etre heureux, c’est être parfaitement adapté à la culture de masse. » 

 

1. Introduction « Etre heureux, c’est être parfaitement adapté à la culture de masse » . L’expression est ironique sous la plume de J. Cazeneuve. Mais pour la commenter il faut la prendre au sérieux avant de la discuter.

 

10. Expliquons tout d’abord la formule.

 

11. La « culture de masse » est ouverte à tous. C’est un golfeur en chambre. D’un coup magistral il expédie la balle très haut, vers le ciel. Des mains admiratives se tendent et en suivent la trajectoire au-dessus des terres et des océans. Hélas ! la balle s’arrête au bord du trou qu’elle vient enfin d’atteindre. Et à des milliers de kilomètres, notre golfeur s’abat sur le plancher et sanglote. Non, le club Méditerranée ne peut tout donner ! (spot 1987). Des millions de Français ont vu ce spot magnifique de technique et d’humour. Tout en fantasmant sur des vacances de rêve qu’ils s’offriront peut-être. Il y a bien d’autres témoignages de culture de masse mais celui-ci est particulièrement significatif dans sa banalité même.

1.2 « Etre parfaitement adapté » est tout à fait possible. Dans une nouvelle « L’imitation », Moravia décrit une famille bourgeoise apparemment heureuse. Mais, sur une remarque de son mari, la jeune femme se rend compte que tout leur confort, tout leur mode de vie, des meubles jusqu’aux cigarettes, est une imitation suggérée par la publicité, même dans les moments où elle n’intervient pas. Il en résulte paradoxalement une sensation de bien-être car cette famille garde constamment des points de repère sociaux. Et c’est justement ce qui rassure le mari qui ne comprend pas sa femme. L’adaptation à la culture de masse permet de vérifier que l’on reste dans la norme.

1.3 Et c’est ce qu’on appelle le « bonheur » presque au sens étymologique : le bonheur est le bon-présage, au fond ce qui prépare le bonheur lui-même. C’est le confort minimal (confort : ce qui donne de la force morale, qui réconforte). Une montée prodigieuse du niveau de vie occidental fait que l’on peut confondre bonheur et confort. Les sondages le prouvent : personnellement les gens se sentent heureux mais pensent que les autres sont malheureux et que la vie est dure pour certains. Ce qui est d’ailleurs vrai.

1.9 Donc, même si elle est ironique, la phrase de Jean Cazeneuve est profondément vraie et fournit une base solide de réflexion.

2.0 Ce qui permet d’aller plus loin.

2.1 Le mot « culture » est proche de « culte ». Leur très lointaine racine indo-européenne (kwel-) indique l’idée de tourner (skt:chakra). On tourne autour de l’autel avec attention et ferveur (culte), le cultivateur en fait de même autour de ses plants et se cultiver implique le même effort. Rien à voir avec la « culture de masse » reçue passivement. Combien de téléspectateurs ont vu sans le comprendre le spot du Club Méditerranée ? Combien l’ont jugé « nul » n’ayant ni les outils ni la volonté de le comprendre, de l’apprécier ? Il dépend de chacun d’être consommateur passif ou acteur de ses analyses et de ses choix.

2.2 Mais l’éveil est possible. Dans « L’imitation » de Moravia la jeune femme a donc découvert avec angoisse que l’univers dans lequel elle vit la dépersonnalise totalement, elle et les siens. Elle se réfugie dans les somnifères jusqu’au moment où elle découvre qu’ils sont prescrits par la publicité. Est-elle perdue? Va-t-elle devenir folle ? Non, cette toxicomane d’un genre un peu particulier est sauvée. Elle entame une longue réflexion sur elle-même.

2.3 Et c’est ce que font beaucoup de personnes quand elles se consacrent à des activités qui leur tiennent profondément à cœur. Il suffit de regarder autour de soi pour voir que chacun, en dehors du travail, s’accomplit dans une activité sociale, artistique ou simplement conviviale. Ce peut être une chorale, une association de pêche ou de chasse, la revendication écologique. Pour ne rien dire le l’activité prodigieuse de certains retraités, de certains handicapés puisque quel que soit son état de santé on doit pouvoir trouver sa voie. Et ceci échappe totalement à une massification des intérêts culturels.

2.9 Donc la prise de conscience de soi mène forcément à un bonheur qui n’est pas préfabriqué, qui est vraiment personnel.

 

9. Conclusion. « Quand tu cours après le bonheur, il te tourne le dos » dit un proverbe taoïste. Le besoin sans frein du confort, le « toujours plus » ne rend pas heureux. Le nécessaire est vite atteint : »Tout ce qu’on n’a pas est inutile » dit un autre proverbe chinois. A partir de ce confort minimal la vraie culture, le vrai bonheur deviennent une affaire personnelle fondée sur l’attention à l’accomplissement de soi.

 

Roger et Alii – Retorica – 1340 mots – 8 000 caractères – 2017-12-08